Édition synthétique

Les formes du relief

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 La péninsule coréenne possède un littoral très long par rapport à sa superficie. Alors que sa côte orientale est assez peu découpée, les côtes méridionale et occidentale sont beaucoup plus échancrées et comportent de nombreuses îles au large. D’après une étude de 2014, le linéaire côtier total du continent est de 7 753 km, auxquels il faut ajouter 7 210 km de côtes pour les îles. Les côtes artificielles résultant de la construction de polders pour le développement côtier et les constructions portuaires atteignent pour leur part 5 086 km.

 Les imposantes chaînes de montagnes d’orientation nord-nord-ouest/sud-sud-est sont une des caractéristiques géographiques les plus remarquables de la péninsule coréenne. Il s’agit plus spécifiquement des chaînes du Nangnim et du Taebaek qui sont issues de la formation d’un bassin arrière-arc à l’extrémité du continent asiatique. Ce processus a aussi entraîné la naissance de la chaîne du Hamgyeong et celle du Sikhote Aline en Russie. Le bassin d’Ulleung, au sud-est du pays, a quant à lui été formé à la suite du soulèvement du Taebaek.

 Les hautes chaînes de montagne sont situées de manière asymétrique à l’est et au nord de la péninsule. Elles suivent la ligne formée par les chaînes du Taebaek, du Nangnim et du Hamgyeong. Ces deux dernières accueillent les plus hauts sommets, au-delà de 2 000 m : le Dojeong, le pic de Gwanmo et le mont Duryu dans le massif du
Hamgyeong ; le pic de Huisaek et les monts Maengbu et Nangnim pour le massif du Nangnim. Le long massif du Taebaek, qui s’étend sur 500 km de la côte orientale (depuis la baie de Yeongheung en Corée du Nord jusqu’à Busan en Corée du Sud) présente quant à lui des sommets moins élevés. En effet, les plus hauts massifs comme le Geumgang, le Seorak, et l’Odae culminent entre 1 500 et 1 700 m.

 Dans la partie méridionale de la péninsule, on observe des alternances de granite en formes de cercles et de roches métamorphiques. De grands bassins d’érosion développés dans le granite ont créé des pentes douces de 1 à 10° entre les pentes abruptes des montagnes, permettant la construction de routes et même d’autoroutes. En termes d’analyse géographique, ceci est une illustration classique de l’interaction entre l’homme et son milieu : la géographie physique dicte le paysage tandis que les sociétés s’adaptent.

 La présence des chaînes du Taebaek et du Hamgyeong à l’est explique que les plus grands cours d’eau coulent vers le sud-ouest, les principaux bassins versants étant contraints par les chaînes de montagnes. A contrario, les cours d’eau terminant leur course dans la mer de l’Est à partir des pentes abruptes de ces mêmes chaînes sont moins longs. Cette disparité est une caractéristique centrale de l’hydrographie de la péninsule coréenne. Étant donné les pentes relativement fortes et les différences saisonnières des précipitations dans la péninsule, les cours d’eau sont aussi caractérisés par des régimes hydrologiques contrastés, ce qui contribue à une grande variabilité des écoulements à l’échelle annuelle. En outre, la plupart de ces cours d’eau sont insérés dans de larges vallées à pente douce.

 Occupant une part majeure de la péninsule coréenne, les régions de montagne et leur complexe distribution sont cartographiables de différentes manières. Trois principales méthodes sont généralement utilisées pour représenter la localisation des montagnes : la carte des lignes de crête, celle des chaînes de montagne et, enfin, celle des bassins versants (ou lignes d’interfluves). Le système de ligne de crête du Baekdu-daegan rassemble les interfluves des dix principaux bassins hydrographiques de la Corée et reflète l’imbrication des montagnes. La carte des chaînes de montagnes classe, pour sa part, les massifs en s’appuyant sur l’hypothèse que ces dernières présentent les caractéristiques de l’histoire géologique et des mouvements tectoniques de la péninsule. Cette relation entre massif montagneux et bassins hydrographiques est essentielle dans la construction des paysages coréens. Elle en fait la spécificité.

 La géographie traditionnelle coréenne cherchait à représenter les lignes de crête pour mieux démontrer l’unité géographique de la péninsule coréenne. L’idée était que les systèmes montagneux étaient liés les uns aux autres, de la même manière qu’un cours d’eau est continu. C’est ce qu’on remarque sur la carte de Sin Gyeongjun (1712-1781). La géographie traditionnelle ne faisait pas appel à la science moderne pour expliquer la structure géologique, les formes du relief ou les mutations paysagères. Elle mettait plutôt en avant, comme c’est le cas ici, les bassins versants pour différencier les zones de peuplement humain. Le Baekdu-daegan apparaissant sur cette même carte est une ligne traditionnelle de démarcation, une « longue ligne de crête » (daegan) qui relie le mont Baekdu (un cratère volcanique à la frontière entre la Chine et Corée du Nord) au mont Jiri (le plus haut sommet de la Corée du Sud péninsulaire). Cette représentation du Baekdu-daegan promeut un certain sens d’unité et d’ordre à travers la péninsule, car le mont Baekdu est un véritable symbole national. La cartographie complète et ininterrompue des bassins versants permet également de mieux identifier les cours d’eau et les interfluves. En résumé, cette géographie traditionnelle coréenne permettait surtout de mieux utiliser les espaces montagneux et les caractéristiques géomorphologiques du terrain à travers le prisme de pungsu (mot coréen pour fengshui, traduit de façon approximative par « géomancie » en français).

 

 La carte détaillée des reliefs de la péninsule, présentée sur la page opposée, met en valeur les profils topographiques nord-sud et est-ouest. De petites lignes bleu foncé qui s’étendent dans la mer Jaune, sur la côte occidentale, indiquent les changements opérés par l’homme. Il s’agit d’une série de digues construites pour initier le processus de poldérisation, transformant des espaces maritimes en terres utilisables pour le développement agricole et urbain. Ces lignes dans la mer encerclent donc des zones qui sont déjà – pour certaines – largement poldérisées. Sur le littoral d’Incheon, le polder entre les îles de Yeongjong et de Yongyu accueille l’aéroport international d’Incheon, un des plus importants au monde en termes de trafic, et qui a été classé à plusieurs reprises parmi les premiers pour la qualité de ses services. À 180 km au sud de Séoul, le projet de digue de Saemangeum est très visible sur la carte du relief. Ce projet de développement de terres agricoles et industrielles est un des plus grands projets de poldérisation au monde. Il est aussi controversé, car il entraîne la destruction d’une grande surface naturelle d’habitat humide pour des oiseaux de mer et d’autres espèces.

 

 Les trois cartes ci-dessous présentent différentes manières de visualiser cartographiquement les montagnes coréennes. Ces méthodes sont basées sur la représentation des chaînes de montagne, des grandes lignes de crêtes et des interfluves. C’est la perception que les populations ont de leur pays et des systèmes montagneux. Ces cartes sont en partie stylisées par un ensemble de lignes visant à faciliter la perception des formes et des orientations des chaînes. Elles aident aussi à classifier les rangs des chaînes de montagnes et des interfluves.